8 décembre 2011 4 08 /12 /décembre /2011 08:13

http://www.washingtonpost.com/rf/image_606w/2010-2019/WashingtonPost/2011/12/07/National-Politics/Images/APTOPIX_Romney_2012_0d04c-6181.jpg

En visite mardi dans l'Arizona, Mitt Romney a reçu le soutien de l'ancien vice-président Dan Quayle (Photo AP)

 

 

Dangereusement menacé par Newt Gingrich dans les sondages, Mitt Romney est sur le point de lancer sa contre-offensive. Sans tarder, il lui faut stopper la montée de l'ancien président de la Chambre des représentants ; il ne reste à Romney que 27 jours pour refaire son retard. Comment le candidat mormon peut-il s'y prendre ?

 

Après être arrivé en tête de quatre sondages consécutifs en Iowa lors du début de semaine, des consultations à l'échelle nationale sont venues, hier, confirmer la bonne forme de Newt Gingrich. Selon Gallup, ce dernier est en très légère baisse dans les intentions de votes (36%), tandis que Romney gagne un pourcent, à 23%. Les sondages nationaux sont absolument insignifiants pour prédire l'issue de la course, qui se déroule Etat par Etat, mais ils montrent bien qui profite actuellement de l'élan populaire ; celui-ci est clairement favorable, depuis environ deux semaines, à l'ancien Speaker Newt Gingrich.

 

Plus inquiétant pour Romney, l'avance de Newt Gingrich se creuse dans les quatre Etats qui s'exprimeront les premiers dans la course à la nomination et qui ont une importance capitale dans le processus d'investiture. Selon des chiffres publiés hier par CNN, Gingrich domine Romney dans l'Iowa (33% contre 20%), la Caroline du Sud (43% contre 20%) et la Floride (48% contre 25%). Seul le New Hampshire reste en faveur de Romney : l'ancien gouverneur du Massachusetts y maintient son avance, 35% contre 26%.

 

Avec trois victoires sur quatre en janvier, Gingrich bénéficierait d'un élan considérable pour aborder les scrutins suivants. Romney ne peut pas se permettre de perdre deux scrutins de suite, c'est pourquoi la Floride, qui vote en quatrième position et qui lui est a priori plus favorable que la Caroline du Sud, prend une importance considérable.

 

Pour ralentir la marche en avant de Gingrich, Romney devra se départir de son style caractéristique depuis le début de l'année, qui consiste à concentrer ses attaques sur le président, en vue de l'élection générale, plutôt que sur ses adversaires, en espérant que ces derniers tombent d'eux-mêmes. Cette stratégie a été très efficace jusqu'à présent : Bachmann, en août, a été coiffée sur le poteau par la déclaration de candidature de Perry, lequel s'est ensuite auto-torpillé en débat faute d'entrain et de préparation. Puis ce fut au tour d'Herman Cain de monter dans les sondages, avant d'être mis hors-course par des soupçons de harcèlement sexuel et d'adultère.

 

L'ascension rapide de Gingrich dans les consultations de l'"Hawkeye State" est similaire en bien des points à celle de Mike Huckabee fin 2007. Au mois de décembre de cette année-là, Huckabee avait dépassé Romney, en tête dans l'Etat des mois durant, faute d'une opposition marquée de la part de l'ancien gouverneur du Massachusetts. A l'heure du vote, Romney n'avait rien pu faire, battu de neuf points par son adversaire et laissant filer la nomination à John McCain quelques jours plus tard dans le New Hampshire.

 

Cela va sans dire, Romney ne compte pas refaire la même erreur en 2012. Depuis le début de la semaine, il est pressé de toutes parts, staff et supporters notamment, d'attaquer Newt Gingrich, qui semble loin de s'auto-détruire comme le firent ses prédécesseurs au sommet des sondages. Le terrain est plutôt favorable à Romney, étant donné l'étendue des reproches qui peuvent être faits à Gingrich par les électeurs.

 

Il s'agit avant tout pour Romney de marquer des contrastes avec Gingrich. L'ancien Speaker a dû démissionner de son poste prestigieux en 1999, touché par une affaire d'adultère. Hier, l'ancien homme d'affaires a investi 300.000 dollars dans un spot télévisé vantant sa vie de famille stable ; celui-ci sera diffusé jusqu'en fin de semaine en "primetime" dans deux Etat cruciaux, l'Iowa et le New Hampshire. L'objet du clip ainsi que sa cible ne sont le fruit d'aucun hasard : deux tiers de l'électorat iowan, majoritairement conservateur, se déclare aujourd'hui prêt à changer leur choix de vote le jour des caucus. Romney s'apprête donc à tenter d'entailler la fragile base de soutien de Gingrich en Iowa ; une victoire consécutive dans le New Hampshire lui donnerait un avantage considérable avant d'aller en Caroline du Sud.

 

D'autres attaques sont à attendre de la part du camp Romney. En débat samedi soir, celui-ci ne manquera sûrement pas de s'en prendre aux vues très modérées de Gingrich en matière d'immigration par exemple. Mais avant cela, le quartier général de Romney, situé à Boston, a promis une exposition médiatique plus conséquente de son candidat dans les jours à venir. Comme l'a confié Romney lui-même : "On commence tout juste avec les publicités. (...) Vous allez me voir faire campagne plus aggressivement...". A Fox News, il a confié : "Nous allons faire en sorte que les différences entre mon expérience, mon approche des choses, et la sienne, soient bien exposées aux électeurs. (...) Soyez assurés que je ne serai pas calme ; je vais m'assurer que mon message est entendu fortement et distinctement"

 

Au crédit de Romney se trouve un impressionnant trésor de guerre dont ne peut se vanter Gingrich et qui pourrait menacer sa campagne sur le long terme. Avide de montrer encore un peu plus l'étendue de sa force financière dans le New Hampshire, où il est largement favori, Romney a fait parvenir hier des tracts de campagne directement chez les habitants du "Granite State", par voie postale. Il jouit d'un soutien quasi-unanime de la part des élus républicains de cet Etat, et ce à toutes les échelles.

 

Après avoir minimisé l'attente en Iowa pendant toute l'année, Romney doit s'y activer pour éviter un ras-de-marée qui serait propre à menacer la survie de sa candidature de par son influence sur les scrutins suivants, Caroline du Sud et Floride au premier chef. Comme le confiait hier un conseiller de Romney, dans toutes les élections, le gagnant doit surmonter le moment où il semble qu'il est sur le point de perdre. Favori tout au long de l'année et adversaire attendu des démocrates pour l'élection générale, il se pourrait fort bien que ce moment arrive en ce moment même pour Mitt Romney.

 

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6 décembre 2011 2 06 /12 /décembre /2011 06:21

http://images.politico.com/global/news/111111_gingrich_romney_ap_605.jpg

Les rivaux Gingrich (à gauche) et Romney (à droite) lors du débat présidentiel de Rochester (MI), le 9 novembre 2011

 

 

Selon plusieurs instituts de sondages, l'avance de Newt Gingrich sur Mitt Romney dans l'Iowa est désormais très nette. Romney a encore une trentaine de jours pour attaquer son adversaire et tenter de refaire son retard, mais le temps presse. En décembre, trois débats sont prévus dans le "Hawkeye State", ce qui devrait donner l'occasion à l'ancien gouverneur du Massachusetts de se distinguer de l'ancien président de la Chambre des représentants. Mais est-il possible d'entraver la montée en puissance de Gingrich ?

 

 

Hier, deux sondages conduits par Public Policy Polling et NBC News ont montré que Newt Gingrich gagnait du terrain sur Mitt Romney en Iowa, l'Etat qui s'exprime traditionnellement en premier lors des primaires présidentielles américaines. Le premier de ces deux instituts montre que l'ancien Speaker dispose de 27% d'intentions de vote, contre 16% à Romney (marge d'erreur : +/- 4,1%), tandis que NBC News propose des chiffres relativement similaires, 26% contre 18% (+/- 4,8% de marge d'erreur). Le taux d'indécis est de 7% et 9% pour chacun des deux sondages, respectivement.

 

L'avance plutôt confortable de Newt Gingrich en Iowa est une raison pour Mitt Romney de s'inquiéter. Hier, dans le New York Times, l'analyste Nate Silver a rappelé que sur les onze caucus disputés dans le "Hawkeye State" depuis 1980, celui qui était en tête des sondages à un mois du scrutin s'est imposé huit fois. Mais en changeant de perspective, la tendance historique sourit plutôt à Romney : sur les cinq cas où le leader avait une avance inférieure à 10% dans les sondages à un mois des caucus, il gagné deux fois mais s'est incliné à trois reprises.

 

En 2008, Mike Huckabee s'était imposé dans les caucus républicains de l'Iowa, malgré toute l'organisation de Romney et l'argent que ce dernier y avait dépensé - environ 10 millions de dollars. Mais Huckabee dominait Romney par une marge bien plus conséquente à un mois des caucus, passant régulièrement au-dessus des 30%, chose que Gingrich ne parvient pas à faire pour le moment. Faute d'une puissance financière suffisante dans les scrutins suivants, Huckabee s'est effondré sous les coups de John McCain, soudainement soutenu par tout l'establishment républicain et qui a rapidement scellé la nomination.

 

La comparaison entre 2012 et 2008, quoique contrastée sous un certain regard, ne va pas sans son lot de similitudes. Comme Huckabee en 2008, Gingrich manque cruellement d'organisation en Iowa mais peut compter - selon les sondages actuels - sur une popularité très importante. En matière de fonds, comme en 2008, Romney domine de la tête et des épaules, puisqu'il totalisait plus de 32 millions de dollars fin septembre, quand le compte en banque de la campagne de Gingrich était empêtré dans le négatif.

 

L'ancien président de la Chambre des représentants va sans aucun doute profiter d'un coup de pouce des investisseurs qui, à la faveur de ses bons résultats dans les sondages, seront moins réticents à l'appuyer dans son effort présidentiel. Mais encore une fois, les questions organisationnelles montrent à quel point, en Iowa comme au niveau national, la campagne de Gingrich est fragile. Ses équipes ont par exemple manqué de verser un chèque de mille dollars à temps pour être inscrit sur les bulletins de vote dans le Missouri, ce qui met l'ancien Speaker de facto hors-course dans cet Etat.

 

Ainsi, le plus grand espoir de Romney est de maintenir son avance dans le New Hampshire, l'Etat qui s'exprime en deuxième position dans le processus des primaires américaines, pour éventuellement encaisser une défaite dans l'Iowa et prolonger, de par l'étendue de son trésor de guerre, son effort présidentiel dans les Etats suivants. Selon les derniers sondages dans le "Granite State", Romney domine largement Gingrich, 39% contre 23%.

 

Plusieurs signes montrent que Romney peut revenir en Iowa. Au delà des indices actuels et autres tendances historiques, l'équipe de Romney s'est fait très discrète dans la presse pour préparer un argumentaire à charge contre Gingrich. Seront notamment au centre de l'attention son passé de leader controversé à Washington, les scandales qui ont entouré ses quatre années à la tête de la Chambre des représentants, sans oublier les juteux dividendes que lui ont apporté ses diverses collaborations avec des lobbies démocrates, dans les années 2000. Gingrich, comme les précédentes "stars du moment" (Bachmann, Perry, Cain, entre autres) n'est donc pas à l'abri d'un effondrement soudain dans les sondages.

 

Les trois débats qui se profilent en Iowa avant la nouvelle année (10, 15 et 27 décembre) vont sans aucun doute donner à Romney matière à mettre en oeuvre son retour. Ce dernier n'est pas avantagé par sa religion mormone dans un Etat dominé à 60% par les chrétiens évangélistes, mais en face des trois mariages - et deux adultères avoués - de Gingrich, les 42 ans de mariage et les cinq enfants d'Ann et Mitt Romney sont incontestablement un atout. Pour ce qui est des idées à proprement parler, Romney s'est écarté de son pedigree modéré pour adopter une position plus conservatrice que Gingrich en matière d'immigration : l'ancien Speaker est favorable à l'amnistie pour les immigrés illégaux présents aux Etats-Unis depuis vingt ans ou plus, quand Romney s'y oppose.


 

En somme, une victoire de Romney dans l'Iowa semble difficile, mais elle n'est pas impossible. Surtout, sur le long-terme, il apparaît qu'une défaite dans le "Hawkeye State" pourrait ne pas être préjudiciable, étant donné les faiblesses organisationnelles de la campagne de Gingrich. A l'approche de Noël, si l'avance de Gingrich ne faiblit pas, Romney abandonnera tout effort en l'Iowa pour ne pas y faire figure de perdant, clamant aux électeurs qu'il n'y a pas livré bataille. Une tactique déjà utilisée par un candidat modéré, détesté par la droite dure en Iowa, mais très populaire dans le New Hampshire. C'était en 2008 : cette année-là, John McCain avait remporté haut la main la nomination du Parti républicain.

 


 

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3 décembre 2011 6 03 /12 /décembre /2011 09:34

http://americasvoiceonline.org/page/-/americasvoice/images/gingrich%20romney%20perry.jpg

Gingrich, Romney et Perry constituent le trio de tête de la course à la nomination républicaine de 2012

 

 

Trente jours nous séparent désormais du début des primaires présidentielles américaines, habituellement lancées par les caucus de l'Etat de l'Iowa, situé dans le centre des Etats-Unis. Le processus de sélection du champion du Parti républicain étant très particulier, les trente jours précédant le scrutin ont sans doute plus d'importance que le scrutin en lui-même. Le point sur la situation.

 

Côté républicain, dans toutes les campagnes de primaires modernes, prendre un bon départ a été vital pour remporter l'investiture du parti. Quelques tendances, de ce point de vue, sont très intéressantes à examiner. Depuis 1980, Iowa et New Hampshire ont toujours été les deux premiers Etats à s'exprimer. Leurs profils sont tout à fait opposés : l'Iowa est un Etat du Midwest, très conservateur et dominé par les chrétiens évangélistes, tandis que le New Hampshire est un Etat modéré du Nord-Est, plutôt favorable aux candidats de l'establishment.

 

Les natures très différentes des deux Etats qui lancent la course à la nomination cimentent habituellement le soutien de chaque bord du parti républicain autour d'un candidat. Pour survivre, il est indispensable de remporter l'un des deux Etats inauguraux. Depuis 1980, la course à la nomination s'est toujours jouée entre les vainqueurs de l'Iowa et du New Hampshire, quand ceux-ci étaient différents.

 

Une autre caractéristique propre aux républicains réside dans le fait que les électeurs du parti de l'éléphant ont l'habitude de trancher vite entre les deux propositions qui émergent de l'Iowa et du New Hampshire. Ainsi, depuis 1980, la Caroline du Sud a toujours donné le nom du vainqueur de la nomination parce qu'elle vote toujours tôt dans le processus des primaires.

 

Si la logique se poursuit en 2012, on pourrait obtenir l'identité du challenger de Barack Obama dès le 21 janvier, date de la primaire de Caroline du Sud. Trois Etats joués, seulement 65 délégués distribués sur les 1.145 nécessaires pour gagner, et l'investiture pourrait être scellée : une curiosité mathématique qui s'appuie sur des règles psychologiques avérées renforçant l'importance capitale du départ des primaires.

 

L'esprit des électeurs est souvent indécis jusqu'au bout, ce qui explique que les primaires durent généralement peu de temps. En effet, les deux premiers Etats à voter, de par leurs caractérisques socio-culturelles, sont propres à donner le "la" pour les scrutins suivants, au premier chef se trouvant la Caroline du Sud. Depuis trente ans, celle-ci a agi comme le poids faisant pencher la balance en faveur de l'un des champions de chaque frange - conservatrice et modérée - du parti républicain. Les électeurs indécis des Etats suivants donnent ensuite leur voix au candidat qui émerge comme le leader parce que, grâce à ses précédentes victoires, les médias se concentrent sur lui.

 

Dans ces conditions, l'importance du dernier mois de campagne avant le début des primaires prend tout son sens. Il s'agit pour chaque candidat d'occuper l'espace politique propre à lui apporter la victoire soit en Iowa, soit dans le New Hampshire, dans l'espoir de rapidement sceller la nomination dans les Etats suivants. En 2008, c'est ainsi que l'élan médiatique (momentum) a propulsé John McCain du statut de perdant en Iowa jusqu'à celui de nominé en moins de deux mois.

 

La force de Mitt Romney, tout au long de l'année, a été de maintenir un soutien très stable d'environ 40% dans le New Hampshire, soit le double de son concurrent le plus proche, qui a tantôt été Pawlenty, Bachmann, Perry, Cain, et maintenant Newt Gingrich. Depuis six mois, il ne fait guère de doute qu'il sera l'homme fort de l'establishment : l'impressionnant nombre de soutiens qu'il a récoltés au sein du parti peut en témoigner.

 

Pour ce qui est de l'Iowa, c'est encore une inconnue. Tous les candidats proches du Tea Party, qui ont Romney en horreur, ont eu leur moment de gloire dans les sondages de cet Etat. Aujourd'hui, Gingrich semble tenir la corde, ce qui est un comble puisque l'ancien Speaker a bâti toute sa carrière à Washington, au Congrès ou dans ses lobbies, des institutions qui sont l'objet des critiques acerbes des électeurs conservateurs. Aussi Rick Perry, malgré toutes ses gaffes, n'est pas à éliminer aussi vite de la course à la victoire en Iowa, un Etat dans lequel il fait actuellement parler sa puissance financière en investissant massivement en spots télévisés.

 

Seulement, le Texan n'est pas le seul à insister férocement sur le Hawkeye State : Mitt Romney s'essaye depuis quelques jours à séduire un électorat qui n'est pas le sien pour tenter d'y forcer la décision, et donc la nomination. En effet, une double victoire Iowa-New Hampshire lui assurerait une investiture quasi-automatique, car il aurait réussi à unifier les deux tendances rivales du Parti républicain, que le feu du Tea Party tente d'opposer depuis des mois.

 

Mais à trente jours des premiers scrutins, rien ne semble joué. La montée de Newt Gingrich pourrait mettre à mal la domination de Romney dans le New Hampshire, tout comme le bona fides modéré de l'ancien président de la Chambre des représentants pourrait revenir au doux souvenir des militants du Tea Party, très présents en Iowa. Bien malin qui pourra dire qui va l'emporter...

 

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3 décembre 2011 6 03 /12 /décembre /2011 07:23

PLAT 1

Mon premier ouvrage, L'Amérique de Mitt Romney, sortira le 12 janvier prochain aux éditions Demopolis


 

"Science et connaissance, art et anticipation - deux couples qui se cachent bien des choses... Mais quand ils se comprennent, rien au monde ne les surpasse". Cette bonne parole de Vladimir Nabokov décrit parfaitement à la fois les raisons qui m'ont poussé à écrire L'Amérique de Mitt Romney, et à la fois ma ferme conviction que Romney remportera, dans quelques semaines, la nomination présidentielle du Parti républicain.

 

J'ai depuis longtemps un vif intérêt pour l'univers politique américain. Le lancement de ce blog, en septembre 2010, est à percevoir comme un "débordement" de passion. L'écriture de ce premier ouvrage participe du même élan d'enthousiasme, si ce n'est que cette fois, le livre vient avec une dose de gageure qui rend l'entreprise extrêmement prenante.

 

Aucun doute là-dessus, ce livre est un véritable pari. Loin d'être insensé, il est basé sur des tendances historiques et circonstancielles, autant qu'il est le fruit d'un certain instinct d'anticipation que je m'efforce d'exercer. C'est une "analyse politique comparée", comme le souligneraient mes professeurs outre-Manche, qui résulte de centaines d'heures d'exploration des précédentes élections, des personnages-clés de la primaire républicaine, ainsi que des enjeux de 2012.

 

En novembre 2010, Romney a été très présent lors des élections de mi-mandat, qui ont vu la victoire des républicains sur les démocrates. Un signe qu'il allait sans aucun doute se présenter en 2012. Il m'a fallu jusqu'à mars 2011 pour analyser le positionnement qui allait être celui de Romney lors de la campagne présidentielle. Puis quelques semaines supplémentaires pour rédiger le texte.

 

En août 2011, la maison d'édition Demopolis m'a proposé un contrat. Laurent Hebenstreit, le directeur de Demopolis, n'est pas étranger aux biographies sur des personnages du monde politique américain. En 2007, il a publié L'Amérique de Barack Obama, la première biographie non-anglophone sur le futur président des Etats-Unis ; le nom de mon ouvrage à paraître sonne comme une évidente filiation. Celui-ci est préfacé par François Durpaire, l'un des auteurs de L'Amérique de Barack Obama.

 

 

A un mois de la parution et du début des primaires, l'instinct et la certitude qui m'ont poussé à écrire la biographie de Romney sont toujours là, et bien là. A l'abord de la dernière ligne droite, il semble que seul Newt Gingrich soit en mesure d'entraver la marche de Romney vers la nomination. J'ai bon espoir que l'ancien Speaker, rattrapé par son ego et/ou les nombreuses casseroles qu'il traîne derrière lui, finisse par s'effondrer. Romney, loin d'être le candidat parfait pour les électeurs républicains, dispose de toutes les armes pour l'emporter.

 

Pour autant, mon engagement ne doit surtout pas être perçu comme une ferveur partisane. J'ai toujours pris soin, en rédigeant L'Amérique de Mitt Romney, de garder mes distances avec toute forme de soutien, écrivant avec la seule conviction que la neutralité est le meilleur gage d'objectivité. Ca et là, je critique donc l'action de Romney, tout comme parfois, je fais montre à son égard d'une certaine admiration.

 

Aujourd'hui, je ne me lancerai pas le pari de dire si Romney battrait Obama en cas de face-à-face entre les deux hommes en novembre. Les républicains ont leurs chances et le président sortant, s'il n'est pas en position idéale, profite encore de quelques indicateurs-clés en sa faveur. Comme l'ancien homme d'affaires le martèle depuis des mois, c'est l'état de l'économie à l'automne 2012 qui décidera du sort de l'élection.

 

Toujours est-il, Mitt Romney a plus de chances que les autres républicains de faire d'Obama "le président d'un seul mandat" (one-term president). J'espère que mon art et mon anticipation vous intéresseront à la lecture de L'Amérique de Mitt Romney. J'ai pris le pari qu'ils se comprendraient avec la science des chiffres et la connaissance du passé.


 

Soufian Alsabbagh


Portrait fond noir dégradé

 

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29 novembre 2011 2 29 /11 /novembre /2011 20:16

http://images.lpcdn.ca/435x290/201111/02/403268-herman-cain.jpg

A Washington, Herman Cain s'explique sur les premières accusations de harcèlement sexuel qui le frappent, le 2 novembre 2011 (Photo Reuters)


 

Quatre semaines après les premières accusations de harcèlement sexuel contre lui, Herman Cain doit affronter Ginger White, une femme qui a révélé lundi qu'elle avait été sa maîtresse, treize années durant. Cette nouvelle menace encore un peu plus la campagne de l'ancien homme d'affaires, dont les rumeurs annoncent qu'elle prendra fin au cours de la semaine.

 

Ginger White, une habitante d'Atlanta comme Herman Cain, a annoncé avant-hier avoir entamé une relation consensuelle avec ce dernier après une rencontre lors d'un dîner d'affaires dans les années 1990. White affirme qu'en raison du début de la campagne présidentielle de son amant, Cain a dû arrêter de la voir il y a huit mois. Textos et traces d'appels sur son téléphone à l'appui, Ginger White a tout dévoilé lors d'une interview à Fox News.

 

Selon White : "C'était très simple... Oui, ce n'était pas compliqué : je savais qu'il était marié, je savais aussi que je m'étais engagée dans une histoire au caractère tout à fait inapproprié". A Fox News, elle a dit qu'elle n'était "pas fière" et qu'elle "ne voulait pas ressortir tout cela", mais qu'elle l'avait fait pour éviter que l'affaire soit révélée à la presse par quelqu'un d'autre.

 

Cain, de prime abord, a démenti ses accusations, expliquant, comme il l'a fait pour Sharon Bialek par exemple, qu'il essayait simplement d'"aider une amie" avec laquelle il n'a eu aucune relation sexuelle et qui "n'avait pas de travail". "Je n'ai rien fait de mal", avançait hier soir Herman Cain à Wolf Blitzer, de CNN.

 

Les cinq femmes qui se sont avancées au cours du mois dernier pour l'accuser de harcèlement sexuel ont assurément causé sa chute dans les sondages. Fin octobre, Cain était considéré comme le favori pour remporter la nomination, avec des chiffres dépassant les 30% au niveau national. Dans les Etats-clés de la course à l'investiture du Parti républicain, l'ancien PDG de Godfather's Pizza a même réussi à maintenir son avance jusqu'à la mi-novembre. Mais dans le dernier sondage mené nationalement, le 27 novembre, Cain est retombé à 13% des intentions de vote.

 

Cette nouvelle révélation au sujet du candidat républicain va sans aucun doute lui aliéner le soutien des conservateurs qui l'avaient propulsé au sommet des sondages il y a quelques semaines. Sean Hannity et Mike Huckabee, hier, ont tous deux abandonné publiquement leur confiance en Cain. Pendant ce temps-là, celui-ci déclarait à son équipe qu'il "remettait en question" sa campagne, laissant présager d'une fin très proche.

 

Dans la nuit, son porte-parole Mark Block assurait : "Hors de question qu'il abandonne". Mais comment continuer alors que tout le monde quitte le navire ? Cain va bientôt arriver à cours d'argent car ses soutiens financiers fondent comme neige au soleil. La "Super PAC" californienne au service de Cain, Draft Herman Cain PAC, a changé son nom pour Beat Obama Political Action Committee. William Panek, un représentant du New Hampshire, a annoncé qu'il abandonnait son soutien à Cain pour se mettre au service de Gingrich

 

Un assistant de Cain aurait confié au journal Politico que le candidat décidera, dans le cours de la semaine, d'abandonner la course à la nomination ou non. Mais les choses paraissent déjà bien engagées en faveur d'un retrait, sachant que Cain lui-même a demandé à son équipe d'annuler un dîner de récolte de fonds prévu à New York dimanche soir, "au cas ou j'aurais quitté la course". "Ma femme aura le dernier mot", l'homme d'affaires disait-il hier sur CNN.

 


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29 novembre 2011 2 29 /11 /novembre /2011 08:31

http://www.admiroutes.asso.fr/larevue/2011/121/occupy-wall-street.jpg

Le mouvement Occupy Wall Street ne semble pas perdre sa vigueur (Photo Getty Images)

 

 

Comme le montrent les protestations actuelles, le symbole de la puissance financière des Etats-Unis est fortement impopulaire... Mais pas auprès des candidats à la présidence américaine, qui ont besoin de ses fonds pour mener à bien leurs coûteuses campagnes. En 2012 encore, l'argent sera le nerf de la guerre ; mais cette fois, puiser dans le formidable réservoir qu'est Wall Street comporte d'importants risques politiques.

 

En raison de la crise persistante, Wall Street est l'objet de la colère des "Indignés" américains, unis sous la bannière du mouvement Occupy Wall Street. Les protestestions contre le temple de la finance mondiale rassemblent surtout des jeunes, novices en politique ou supporters démocrates déçus par l'action d'Obama, mais aussi quelques uns des Américains les plus conservateurs, appartenant à la frange républicaine du Tea Party. D'un bout à l'autre de l'échiquier politique américain, le symbole du capitalisme tremble au pays où il est pourtant roi depuis toujours.

 

Cela ne rebute pas les candidats républicains à la présidence, qui ont besoin d'argent pour se défendre dans des primaires que certains spécialistes annoncent plus longues que de coutume, au printemps prochain. Il en est de même pour Obama, qui ambitionne de franchir la barre mythique du milliard de dollars pour sa campagne de réélection. Le président ne pourra sans doute pas composer sans la généreuse contribution des démocrates de Wall Street s'il veut atteindre son objectif financier.

 

Jusqu'à récemment, les contributions étaient plafonnées à 2000 dollars par donneur et par campagne, tandis que les "political action committee" (PAC), organisations au service d'un candidat, ne pouvaient recevoir plus de 5000 dollars de la part d'un donneur. Mais depuis la décision United Citizens vs. FEC, prise en 2010 par la Cour suprême américaine, les candidats - pour n'importe quel poste électif que ce soit - peuvent profiter d'une "Super PAC". Celle-ci consiste en un organisme autorisé à collecter des fonds de façon illimitée, notamment auprès des grandes entreprises, et de l'industrie financière plus largement.

 

Sans surprise, c'est l'ancien homme d'affaires Mitt Romney qui mène la danse à Wall Street, avec 3,6 millions récoltés à New York durant les trois mois de juillet, août et septembre. Hier, le favori du parti de l'éléphant a enregistré le soutien de Steve Schwarzman, 64 ans, considéré comme l'un des meilleurs à Wall Street en matière de levée de fonds. Restore Our Future, la "Super PAC" de Romney, a également apporté, selon les chiffres les plus récents, au moins 12 millions de dollars à l'ancien gouverneur du Massachusetts.

 

Pour couronner le tout, son passé à la tête de Bain Capital, un juteux fonds d'investissement, a permis à Romney d'amasser une fortune estimée cet été à environ 260 millions de dollars. En 2008, Romney avait investi au moins 33 millions de dollars de son propre compte en banque pour financer son premier effort présidentiel. Le candidat mormon fait figure d'épouvantail dans le champ des candidats républicains, qui peinent tous à maintenir une base stable de supporters et de contributeurs.

 

Côté démocrate, l'appui financier proposé par Wall Street est loin d'être négligé par les équipes du président Obama. Pour l'instant, les efforts de ce dernier ne sont pas couronnés de succès, mais ce n'est pas faute d'essayer. Obama n'a récolté "que" 1,6 millions de dollars à Wall Street, contre plus de 18 millions lors de sa campagne victorieuse de 2008.

 

Barack Obama multiplie les attaques contre Romney et sa fortune depuis plusieurs semaines maintenant, dans l'espoir d'attirer les manifestants d'Occupy Wall Street dans les urnes. Un piège qui pourrait se retourner contre le président, dont l'adversaire, quel qu'il soit, ne manquera pas de souligner qu'il dispose lui aussi d'une "Super PAC", Priorities USA Action, et de l'appui de tout le parti démocrate.

 

Barack Obama dispose à l'heure actuelle d'au moins 160 millions de dollars pour mener à bien sa réélection. Bien que l'immense majorité de cet argent provienne directement des électeurs, il devra veiller à ne pas s'aliéner les plus généreux donateurs de Wall Street, qui, s'il fallait mettre la main à la poche en faveur da la "Super PAC" du candidat républicain, ne se gêneraient pas pour contribuer de façon illimitée.

 

Le président tente aujourd'hui de jouer sur les deux tableaux. Mais le discours anti-régulation des prétendants du parti de l'éléphant à la Maison-Blanche est propre à retourner contre Obama la puissance financière dont il avait profité en 2008. Le fait qu'Obama garde aujourd'hui ses distances avec les protestations n'a donc rien d'un hasard : pour gagner la guerre en 2012, il faudra remporter la bataille de Wall Street, qui se jouera à la fois dans les urnes et dans les portes-monnaies.

 

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27 novembre 2011 7 27 /11 /novembre /2011 20:52

http://static6.businessinsider.com/image/4ed246d569bedd125a000002/new-hampshire-union-leader.jpg

Le journal New Hampshire Union Leader, une importante force conservatrice du "Granite State", a officiellement apporté son soutien à Newt Gingrich dimanche matin.

 

 

C'est sans doute le soutien le plus important qui a été délivré jusqu'à présent dans la course à la nomination républicaine. En soutenant officiellement l'effort présidentiel lancé par Newt Gingrich, l'Union Leader tacle sévèrement le favori Mitt Romney, très populaire dans l'Etat de New Hampshire. Le point sur les causes et les conséquences de ce choix d'importance à moins de quarante jours du début des primaires. 

 

La nouvelle est venue agiter, hier matin, une course à l'investiture mise entre parenthèses pendant les fêtes de Thanksgiving. Les spécialistes n'avaient guère de doutes sur l'identité du candidat soutenu par l'Union Leader. Le journal, d'essence conservatrice, recherche depuis trente ans des outsiders à la fibre plutôt modérée. Mitt Romney était éliminé d'office, car il fait pour le moment figure d'épouvantail dans le New Hampshire. Au milieu d'autres candidats courtisant tous le Tea Party, il ne restait que Gingrich.

 

Selon Joseph McQuaid, le patron de l'Union Leader, "nous cherchons des conservateurs qui ont un esprit indépendant, convaincus du bien-fondé des croyances de cette nation et de son peuple, et les mieux préparés pour la tâche de président. (...) Dans cette élection d'une importance capitale, le candidat qui répond à toutes ces caractérisques est Newt Gingrich. Il a l'expérience, les qualités de leadership, et la vision des choses qu'il convient pour mener ce pays en ces temps difficiles".

 

Son profil était idéal pour Joseph McQuaid, car Gingrich est sur une pente ascendante et s'impose depuis trois semaines comme l'alternative la plus crédible à Romney. En 2000, le journal avait ainsi opté pour Steve Forbes contre Bush et McCain, tandis qu'en décembre 2007, il avait choisi McCain au dépens de... Mitt Romney. A un mois du début des primaires, le soutien de l'Union Leader avait apporté un coup de pouce considérable au "comeback" dont le sénateur de l'Arizona fut l'auteur, et qui le propulsa jusqu'à l'élection générale de novembre 2008.

 

Le journal n'a pas toujours eu la main heureuse lorsqu'il s'est agi de sélectionner son champion républicain pour la présidentielle. En trente ans, seuls Ronald Reagan (1980) et John McCain (2008), ont été soutenus par l'Union Leader puis ont remporté la nomination. Mais en attendant le résultat du scrutin, au printemps prochain, cette nouvelle n'est assurément pas encourageante pour Mitt Romney.

 

L'ancien gouverneur du Massachusetts a tout fait pour obtenir le précieux soutien du journal, multipliant les apparitions publiques avec Joe McQuaid - la dernière date d'il y a dix jours. Si ce dernier s'était rallié à Romney, alors la course dans le New Hampshire était sans doute définitivement gagnée pour Romney. Mais McQuaid a toujours eu l'habitude de sélectionner des outsiders, car cela renforce l'attention des médias sur son Etat en rendant la course plus serrée.

 

Selon Alexander Burns, de Politico, McQuaid a réussi dans son éditorial à faire ce qu'aucun candidat n'était parvenu à faire jusqu'alors : dresser un bilan complet des arguments anti-Romney. Bien que le nom de l'ancien homme d'affaires n'apparaît jamais dans la colonne du journal, des arguments tels que "il est loin d'être le candidat parfait" sonnent comme des attaques directes envers Romney. Drew Cline, toujours pour l'Union Leader, ajoute également que Romney aurait été un très bon candidat à la présidence "à la fin du XIXème siècle". Cline reproche à Romney son attitude très prudente envers les électeurs, ainsi que le fait d'être avide de leur dire "ce qu'il croit que nous voulons entendre".

 

A courte échéance, le soutien du populaire journal va sans aucun doute contribuer à ralentir la marche de Romney vers la victoire dans l'Etat. Mais comme en 2008 avec McCain, cela aura-t-il un impact tel que Gingrich va s'envoler vers l'investiture du parti ? Impossible de la savoir pour le moment, car en dépit de la propulsion médiatique, Gingrich manque cruellement d'une organisation de terrain sur laquelle Romney travaille depuis plus de cinq ans. 

 

Par ailleurs, l'ancien gouverneur du Massachusetts augmente prograssivement sa couverture de l'Etat de l'Iowa, qui vote en premier, pour essayer de forcer la décision une semaine plus tard dans le New Hampshire. Son espoir est de plier la course rapidement, et comme le montre le soutien d'hier, il apparaît que seul Gingrich puisse l'empêcher de réaliser ses projets. Mais l'ancien Speaker ira-t-il jusqu'à contester effectivement l'hégémonie de Romney dans le "Granite State" ? C'est le plus grand espoir de Joe McQuaid.

 


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23 novembre 2011 3 23 /11 /novembre /2011 08:22

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Hier soir, en débat à Washington, Newt Gingrich s'est fait remarquer par sa prise de position modérée sur l'immigration (Photo AP)

 

 

L'économie et, plus largement, la politique intérieure des Etats-Unis seront au coeur de l'élection de 2012. Cependant, pour procéder au choix du chef des armées américaines (Commander-In-Chief), il convient d'évaluer les candidats à la présidence sur leurs positions en matière de politique étrangère. Alors que les huit principaux prétendants à la Maison-Blanche peinent à se différencier dans leur critique unanime du président Obama, les affaires internationales les font diverger significativement, et pourraient ainsi venir les départager.

 

Depuis de longs mois, il ne fait guère de doute que l'économie sera la préoccupation principale des Américains à l'automne 2012. La prévision de croissance pour l'an prochain a été révisée à la baisse avant-hier par le gouvernement américain. Plus important encore, le taux de chômage reste de 9% en octobre, après un pic à 10,1% en novembre 2010. Pourtant, Barack Obama avait promis, en février 2009, que son plan de relance de 787 milliards de dollars le garderait en dessous des 8%.

 

En matière d'économie, il est donc difficile de dresser des différences entre les candidats républicains, unanimement convaincus de l'échec de Barack Obama. Le président, en mal de résultats sur le front économique, possède néanmoins un bilan plutôt favorable en politique étrangère, avec notamment des opérations victorieuses en Libye ainsi qu'au Pakistan, qui a vu s'éteindre la menace Ben Laden s'éteindre au printemps dernier. Malheureusement pour Obama, il pourra difficilement s'appuyer sur ces bons résultats l'an prochain, la priorité des Américains étant de retrouver un emploi et/ou de remettre les finances de leur pays à l'équilibre.

 

Les spécialistes s'attendaient hier à ce que, une nouvelle fois, l'action de Barack Obama soit vivement critiquée par les candidats républicains lors du débat. Dans l'après-midi, le premier spot télévisé lancé par Mitt Romney dans le New Hampshire laissait présager d'une féroce charge contre le bilan du président démocrate. Mais en réalité, les débats se sont très peu concentrés sur Barack Obama. Plus surprenant encore, les candidats ont su se distinguer les uns des autres sans avoir recours à des attaques personnelles, un fait plutôt rare au vu des dix premières joutes qui les ont opposés cette année.

 

Selon Roger Simon, analyste conservateur du journal Politico, "c'était le débat le plus extraordinaire de la saison : un candidat républicain à la présidence a dit : 'Soyons humains dans la façon de faire appliquer la loi' et il ne s'est pas fait hué". La phrase a été lancée par Newt Gingrich, nouvelle coqueluche des médias, qui a expliqué sa position en matière d'immigration illégale au public de Washington : "Je suis prêt à prendre un coup de chaud en disant cela, mais (...) si vous êtes là depuis 25 ans, que vous avez trois enfants et deux petits-enfants, que vous avez payé vos impôts et obéi à la loi et que vous appartenez à une église locale, je ne pense pas que l'on devrait vous séparer de votre famille, vous déraciner de force et vous jeter dehors".

 

Michael Shear, du New York Times, réagit ce matin en faisant valoir que la modération de Gingrich, tout frais arrivé en tête des sondages, en matière d'immigration pourrait revenir le hanter, tout comme ce fut le cas pour Rick Perry il y deux mois. Mitt Romney et Michele Bachmann ont tous deux signifié à Gingrich qu'ils n'étaient pas d'accord avec lui, "l'amnistie" ne pouvant que conduire à de nouvelles arrivées illégales selon eux.

 

Une des plus grandes divergences de la soirée a opposé Jon Huntsman, ancien gouverneur de l'Utah, à Mitt Romney, ancien gouverneur du Massachusetts, sur la question du retrait des troupes d'Afghanistan. En pleine lutte pour l'électorat modéré de l'Etat-clé du New Hampshire, Romney s'est prononcé contre le plan présidentiel de retrait rapide des troupes, tandis que Huntsman y est favorable.

 

Rick Perry, Herman Cain et Ron Paul se sont montrés trop en retrait dans le débat, que ce soit faute d'entrain, de connaissances solides, ou bien de vues trop extrême. Le libertarien Ron Paul, notamment, s'est distingué de tous les autres candidats en prenant position contre le Patriot Act de George W. Bush (2001), avide de ne pas sacrifier la liberté au profit de la sécurité. Tout à l'opposé, Rick Santorum a proposé "de suivre à la trace" les musulmans présents dans les aéroports : selon l'ancien sénateur de Pennsylvanie, "ce sont les personnes qui ont les plus fortes probabilités de commettre un attentat".

 

Le principal enseignement du débat d'hier soir repose sur le fait que, bien que qu'elles n'ont que peu de chances de peser sur l'issue de l'élection, les questions internationales sont un bon moyen de jauger le positionnement idéologique de chaque candidat. L'orthodoxie démontrée par le parti de l'éléphant en matière fiscale, cela a été prouvé hier soir, ne s'applique pas à la politique étrangère. Il en est de même pour l'esprit de compétition qui, à maintenant moins de six semaines des premiers scrutins, ne tardera pas à reprendre ses droits.

 


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22 novembre 2011 2 22 /11 /novembre /2011 18:09
Hier soir, le président Obama annonçait l'échec du comité bipartisan chargé de trouver 1.200 milliards de dollars d'économies dans le budget américain pour les dix prochaines années.



L'annonce de l'échec du "super-comité" bipartisan chargé d'assainir les finances américaines n'a surpris personne. Exécutif comme législatif, démocrates comme républicains, n'ont rien fait pour empêcher la rupture des négociations, car personne ne veut prendre de risques à moins d'un an de l'élection générale de novembre 2012. Hier agissant de concert pour laisser les choses en l'état, les deux camps se reprochent aujourd'hui d'avoir entraîné la fin des pourparlers. Un nouvel exemple de la menace d'effondrement qui plane sur le régime présidentiel américain.


Lancé en grande pompe début août dernier, le processus de "super-comité" bipartisan était censé remettre l'Amérique sur le droit chemin. Les médias ont beaucoup misé sur cette initiative qui semblait enterrer la hache de guerre entre les deux partis du pays, qui se sont déchirés tout l'été sur la question du relèvement du plafond de la dette américaine. Parmi les douze membres du comité, les Américains comptaient sur de grands noms comme John Kerry (sénateur démocrate du Massachusetts) ou Jon Kyl (numéro deux de la minorité républicaine au Sénat pour l'Arizona) pour mettre fin aux querelles intestines qui menacent la santé économique des Etats-Unis.


De cela, il ne fut résolument rien. Rien d'autre que le calme plat qui a caractérisé les trois mois de négociations entre démocrates et républicains. Selon Mike Allen, de Politico, les douze membres du "super-comité" ne se sont pas rencontrés depuis trois semaines. Ceux-ci n'ont jamais pu effleurer l'espoir de parvenir à un accord, préférant se reposer sur l'assurance de coupes automatiques de 1.200 milliards de dollars - à moitié dans l'armée et à moitié dans les programmes sociaux - à partir de janvier 2013, et ce pour les dix années suivantes.


L'artifice bipartisan était censé rassurer les marchés, ce qu'il a brillamment réussi à faire. Grâce aux coupes inéluctables de janvier 2013, les agences de notation seront sans aucun doute clémentes avec le statut financier des Etats-Unis. Mais les électeurs, eux, loin d'être satisfaits : selon le New York Times, le Congrès a atteint un record d'impopularité en novembre, avec seulement 9% d'opinions favorables.


Le graphique suivant en dit long sur la confiance que les Américains placent aujourd'hui en la branche législative de leur système politique : le Congrès est aujourd'hui plus impopulaire que Nixon lors du Watergate (24%). Même l'idée de voir les Etats-Unis verser dans le communisme semble plus populaire (11%) que l'actuel Congrès américain.


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A un an de l'élection générale qui verra les cartes rebattues au Congrès en même temps qu'aura lieu la 57ème élection présidentielle américaine, les démocrates ne voulaient pas accorder aux républicains trop de coupes dans les programmes sociaux sans une contrepartie en termes d'augmentations d'impôts. Le parti de l'éléphant, solidement ancré à droite sous l'influence du TEA (Taxed Enough Already) Party, a quant à lui fait de la "non augmentation" des impôts son cheval de bataille depuis l'élection de Barack Obama.


Dans ces conditions, les coupes automatiques de 1.200 milliards de dollars sans augmentation de revenu pour l'Etat américain arrangeaient les deux partis. A présent s'engage la lutte sur le terrain de l'opinion publique, qu'il faut convaincre pour 2012. Hier d'accord pour mettre fin aux négociations quarante-huit heures avant la "deadline" officielle du 23 novembre, démocrates et républicains se sont aujourd'hui mutuellement reprochés l'échec du "super-comité".


Selon Barack Obama, "de nombreux démocrates avaient l'intention de mettre la politique de côté et avaient promis des réajustements raisonnaibles qui auraient réduit le coût de Medicare". Mais "de trop nombreux républicains ont refusé d'écouter les voix de la raison et du compromis venant du pays", le président a-t-il ajouté.


Les candidats républicains à la présidentielle, complètement écartés du processus législatif, se sont montrés avides de critiquer le président Obama, à qui ils ont la ferme intention de ravir la Maison-Blanche en 2012. Mitt Romney, par exemple, ne s'y trompe pas lorsqu'il attaque Obama sur les coupes budgétaires dans l'armée, à la veille d'un important débat en matière de politique étrangère : "Le monde se doit de regarder et de dire : 'Est-ce que vous voulez vraiment vous allier avec l'Amérique, quand elle traite si mal ses alliés et qu'elle coupe les vivres à son armée ?' Ce dont le monde a besoin, c'est d'une Amérique forte. Et en tant que président, je restaurerai le respect du monde envers l'Amérique".


L'actuel blocage insitutionnel, au fond, ne relève pas seulement des enjeux de l'élection de 2012, aussi cruciale soit-elle. Mais l'échec du "super-comité" fait suite à de nombreuses autres négociations avortées ces derniers mois et il est le reflet d'un système politique en mal de confiance, censé fonctionner grâce à une notion de consensus aujourd'hui complètement absente de l'esprit des législateurs américains.


Certes, les marchés font encore confiance à l'Amérique car elle fournit le strict minimum pour maintenir son standing économique. Mais la crise persistante aux Etats-Unis met en lumière bien plus qu'une récession économique : elle est annonciatrice d'une tempête politique qui pourrait, dans les années à venir, balayer le système présidentiel américain.


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21 novembre 2011 1 21 /11 /novembre /2011 08:14

http://www.washingtonpost.com/rf/image_606w/2010-2019/WashingtonPost/2011/11/13/National-Politics/Images/2011-11-13T021900Z_01_SPA811_RTRIDSP_3_USA-CAMPAIGN-REPUBLICAN-5667.jpg

Newt Gingrich (cravate rouge), partage sa vision de la politique étrangère des Etats-Unis lors d'un débat en Caroline du Sud, le 12 novembre dernier (Photo AP)

 

 

Depuis maintenant deux semaines, la campagne de Newt Gingrich connaît un regain d'attention de la part des électeurs. C'est en tout cas ce que nous confient les instituts de sondages, qui ont délaissé Herman Cain au profit de l'ancien président de la Chambre des représentants pour jouer le rôle de "candidat anti-Romney N°1". Un statut controversé qui pourrait bientôt plonger Gingrich dans la même léthargie que connaissent aujourd'hui Bachmann ou Perry.

 

Les sondages sont unanimes : Gingrich est dans une bonne période car il récupère directement les électeurs qui quittent Herman Cain, accusé de harcèlement sexuel il y a trois semaines. Au niveau national, un sondage conduit par Fox News le 16 novembre donne Gingrich à 23% et Cain à 15%, contre 12% et 24% respectivement le 26 octobre dernier. Plus significatif encore, dans l'Etat-clé de l'Iowa, Gingrich devance maintenant Cain de 19%, 32% contre 13%. Le 19 octobre, les chiffres étaient de 9% pour Gingrich et 28% pour Cain.

 

Ces chiffres, loin d'être les seuls indices dont nous disposons aujourd'hui, montrent l'entendue des dommages que les témoignages accablants de plusieurs femmes ont fait à la candidature d'Herman Cain. Hissé au sommet des sondages à la mi-octobre, Cain avait pris le relais de Rick Perry pour personnifier la frange conservatrice du parti. Son déclin fait donc de Gingrich la nouvelle alternative à l'establishment modéré largement acquis à la cause de l'ancien gouverneur du Massachusetts Mitt Romney.

 

Gingrich est un des gourous les plus respectés au sein du GOP (Grand Old Party). Historien de formation, il a passé quasiment 25 ans à défendre la cause républicaine au Congrès américain. Il y a maintenant 17 ans, Gingrich était à la tête de la "révolution républicaine" qui ramenait la Chambre des représentants, démocrate depuis 1955, dans le camp de l'éléphant. En 1999, Gingrich a dû abandonner son poste de président de la Chambre (Speaker) après des soupçons de scandale et des résultats decevants lors de élections de mi-mandat de 1998.

 

En dépit de sa longue carrière au parti républicain, il est permis de s'interroger sur le bien-fondé de la nouvelle étiquette de Gingrich, désigné champion du Tea Party. En effet, pendant que Clinton était au bord de la destitution, Gingrich entretenait une relation extra-conjugale avec une asssitante nommée Callista, depuis devenue son épouse. La droite chrétienne qui désigne Gingrich comme son favori par défaut ne manquera pas de lui reprocher ses trois mariages ; il est étonnant de voir que l'Etat de l'Iowa, composé à 60% de chrétiens évangéliques, semble aujourd'hui pencher en faveur de Gingrich.

 

Par ailleurs, Gingrich Group, la société fondée par l'ancien Speaker dans les années 2000, aurait perçu 1,8 million de dollars pour des services de consulting rendus à l'agence de notation Freddie Mac, rendue très impopulaire par la crise. Enfin, alors que la réforme de la santé du président Obama est la hantise du Tea Party, le think tank de Gingrich aurait perçu 37 millions de dollars de la part de multiples compagnies pharmaceutiques pour peser sur des décisions politiques. Gingrich défendait notamment, jusqu'à mai 2011, le mandat individuel prôné par Obama et Hillary Clinton, avec qui il avait passé une alliance dans les années 1990.

 

Pour résumer, le pedigree de Gingrich n'est pas tout à fait celui d'un républicain des années 2000. Il reste désormais à savoir si le Tea Party, symbole de la "palinisation" du GOP, va se décider à troquer, dans maintenant 40 jours, un bilan visiblement modéré contre des talents oratoires que l'on dit de taille à rivaliser avec ceux du président Obama. Gingrich a en effet fondé son "comeback" sur des performances convaincantes en débat, tout comme John McCain l'avait fait il y a quatre ans.

 

Mais à la lumière de ce court retour en arrière, il apparaît que la folle remontée de Gingrich est promise au même destin que celle de Perry et de Cain si l'ancien président de la Chambre des représentants continue de courtiser les chrétiens évangéliques de l'Iowa. Sa stratégie prévoit de gagner dans le "Hawkeye State" pour ensuite frapper fort en Caroline du Sud, un autre Etat conservateur. Mais sans un bilan clairement orienté à droite, la victoire est très difficile à imaginer en Iowa.

 

Ainsi, il semble que si Gingrich veut remporter la nomination, il lui faudra récupérer les électeurs acquis à Romney, non ceux acquis à Cain. L'ancien gouverneur du Massachusetts étant actuellement à 40% d'intentions de votes dans le New Hampshire, qui vote en deuxième position, ce ne sera pas chose aisée. Au delà de cela, Gingrich manque d'une organisation solide dans les premiers Etats à voter, ainsi que d'un trésor de guerre conséquent, deux paramètres vitaux pour espérer bien figurer dans la course à l'investiture.

 


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