A trois semaines des élections de mi-mandat, Barack Obama voit ses espoirs d’un basculement moindre du Congrès s’accroître, sans que pour autant la victoire ne pointe à l’horizon. Or, il est vital que les démocrates enregistrent le plus petit écart possible avec les républicains, et ce, dans les deux chambres, dans la perspective de la présidentielle de 2012. Mais il apparaît plus essentiel encore que les républicains endiguent la montée des forces ultra-conservatrices, qui semblent avoir le vent en poupe.
Le mouvement Tea Party discrédite plus qu’autre chose le G.O.P. On peut envisager qu’un minimum de Tea Partiers entre un Congrès, grâce à un électorat modéré mobilisé à la fois contre les démocrates, mais également contre la marginalisation de leur propre parti – qui, à coup sûr, les attend au tournant en cas d’avancées significatives des acolytes de Sarah Palin, qui en est l’incontestable figure de proue.
Si cela devait néanmoins arriver, on pourrait se diriger, pour la première fois depuis 1972, vers une « présidentielle à trois candidats »1, avec l’ancienne gouverneur de l’Alaska dans le rôle du trouble-fête. Les modérés sont conscients qu’une telle éventualité ruinerait leurs chances dans deux ans, en termes de voix, contre le président sortant. D’où l’espoir de voir minimisé le nombre de Tea Partiers entrant au Congrès, au profit du centre-droit.
En effet, c’est à ce doute actuel parmi les Républicains, plus qu’à autre chose, que les démocrates doivent leur remontée dans les sondages. N’en déplaise aux sources – plus ou moins sûres – du Guardian, il n’est pas vraiment dans le style du président américain de raviver la flamme du terrorisme dans le but de gagner des voix2. Par cela, il ne ferait sans doute que faire gagner des voix aux Républicains, et notamment au mouvement Tea Party.
Et quand bien même on pourrait penser que la Maison Blanche voudrait décrédibiliser la droite en vue de 2012, le meilleur calcul reste tout de même de limiter les pertes en 2010, quitte à gouverner plus au centre, mais a minima, faire passer des projets de loi bipartisans, qui au fil des années se font de plus en plus rares. Le meilleur moyen, pour les Républicains, à la fois de concurrencer Obama en 2012, et de se débarrasser des Tea Party, est de redorer leur blason en participant à des projets comme, par exemple, la loi sur le réchauffement climatique, qui avec celle sur la régulation financière, s’annonce comme l’objectif majeur des deux années à venir.
On ne peut qu’espérer, en définitive, une contre-performance des Tea Partiers, puisqu’elle ferait l’affaire des modérés du G.O.P., et qu’en sus, elle limiterait, pour les démocrates, le raz-de-marée républicain annoncé au Congrès. A l’inverse, il a y fort à parier qu’une entrée remarquée du mouvement ultra-conservateur au Capitole ouvrira une autoroute aux démocrates en 2012 ; sans remonter aux cas Roosevelt (1934) et Reagan (1982), les élections de mi-mandat de 1994 ont rappelé le prix qu’une radicalisation lors des scrutins partiels pouvait coûter à la présidentielle suivante3.
Les démocrates, quelque soit le cas de figure, ne sont certainement pas les plus en danger en ce mois de novembre, du moins à moyen-long terme. Il s’agit bien du futur du parti républicain, déjà bien changé depuis Lincoln, qui est en jeu, le prochain scrutin s’avançant comme le baromètre des forces conservatrices pour les années à venir.
1- On entend par « présidentielle à trois candidats » un scrutin lors duquel le collège électoral distribue ses voix à trois candidats de trois partis différents. En 1972, le libertarien John Hospers avait remporté le suffrage – mineur - d’un membre du collège électoral. Il faut cependant remonter à 1968 pour voir une présidentielle disputée entre trois candidats, le trublion George Wallace remportant 46 Grands Electeurs face à Nixon et Humphrey.
2- La semaine dernière, un diplomate pakistanais a confié au quotidien britannique qu’Obama tentait actuellement de médiatiser la menace terroriste en vue des élections.
3- Mis en difficulté par la perte, deux ans plus tôt, des deux chambres du Congrès au profit de républicains alors très conservateurs emmenés par le Speaker Newt Gingrich, le président sortant Bill Clinton s’était imposé sans coup férir en 1996 face à Bob Dole.