13 décembre 2011 2 13 /12 /décembre /2011 15:48

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Mitt Romney dans le New Hampshire, le 6 décembre 2011 (Photo AP)

 

 

Mitt Romney a encore répété hier, dans une interview à Politico, que son instinct lui dit que les primaires républicaines de 2012 seront un long combat qui ne pourrait prendre fin qu'en juin de l'année prochaine. Etant donné les circonstances actuelles d'une course privée d'un leader incontestable et caractérisée par un calendrier très différent des années précédentes, ce scénario est loin d'être impossible. Sans doute pour le plus grand bénéfice de l'ancien gouverneur du Massachusetts.

 

Il y a quatre ans, si un candidat avait eu les chiffres que Gingrich possède actuellement dans les sondages, l'identité du gagnant serait apparue clairement un mois avant le début des primaires. Avec un calendrier très resserré en 2008, le candidat qui parvenait à remporter le plus de victoires dans les premiers Etats était assuré de l'emporter, poussé par un élan médiatique considérable empêchant ses concurrents de revenir dans la course. Avec trois victoires majeures engrangées consécutivement au mois de janvier 2008 (New Hampshire, Caroline du Sud et Floride) John McCain apparaissait inarrêtable et a rapidement atteint la majorité absolue des délégués nécessaires pour remporter la nomination républicaine.

 

Aujourd'hui, Newt Gingrich est largement en tête dans trois des quatre Etats qui lancent la course à la nomination (Iowa, Caroline du Sud et Floride), mais cela est loin de lui assurer la victoire. En effet, deux choses sont fondamentalement différentes en 2012, comparé à 2008.

 

Le premier aspect est circonstanciel et tient de l'extrême fluidité de la course. Depuis l'été, celle-ci voit tour à tour un candidat différent prendre la tête des sondages, puis la perdre aussi abruptement qu'il l'a atteinte.

 

Selon les observateurs américains, Newt Gingrich n'aurait pas pu prendre la tête des sondages à un meilleur moment. Fin novembre, à un peu plus d'un mois et demi du début des primaires, Gingrich surgissait en tête des intentions de vote. Selon les spécialistes, le timing est parfait pour tenir jusqu'à l'Iowa et entrer en position de force dans la course aux délégués. Une autre façon de voir les choses consiste à dire que Gingrich a pris la tête au plus mauvais moment possible.

 

En effet, les différents candidats venus occuper la tête des sondages ont connu une période de "pic" d'une durée étonnamment régulière : deux mois pour chacun d'eux. Le pic de popularité de Gingrich est arrivé tout début décembre, lorsqu'il a pris la place de leader délaissée par Herman Cain et reçu le soutien très important de l'Union Leader, un influent quotidien dans l'Etat non moins influent du New Hampshire. Bien évidemment, les autres candidats ne s'en sont pas laissés compter, conscients du danger que la montée de Gingrich représentait. Ron Paul, Rick Perry et Mitt Romney s'en donnent donc à coeur joie, depuis une dizaine de jours, pour lancer des spots de campagne décrédibilisant la candidature de Gingrich.

 

La muraille de verre construite par Gingrich dans les sondages montre déjà quelques signes de faiblesse ; son avance pourrait ainsi très bien fondre dans les jours à venir. Gingrich entrerait, juste au moment du début des primaires, dans une période de déclin après deux mois de bons résultats dans les sondages. Ce matin, Reuters a dévoilé des chiffres qui montrent à quel point son avance est fragile en Iowa. L'avance considérable de Gingrich dans cet Etat ne prédit en rien les résultats qui sortiront des urnes le 3 janvier prochain car l'ancien Speaker manque d'une organisation suffisante pour amener ses électeurs à se rendre au bureau de vote.

 

Deuxièmement, le calendrier rend un KO à la John McCain 2008 improbable, les scrutins les plus importants en termes de délégués mis en jeu n'arrivant pas avant avril (voir le calendrier complet).

 

Les trois premiers mois de l'année ne verront que la moitié des délégués être mis en jeu, alors que la proportion était bien plus importante lors des élections de la décennie précédente. En particulier, l'impact réduit du Super Mardi - seulement 555 délégués en jeu, contre plus de 900 lors des primaires républicaines de 2008 - et son placement tardif dans le calendrier - 8 semaines après l'Iowa, contre 4 semaines en 2008 - ne pourra sans doute pas permettre à l'un des candidats de faire la différence tôt.

 

Bien évidemment, des primaires longues ne peuvent qu'avantager Romney, dont l'équipe de campagne a vite compris que la nomination républicaine allait être un marathon. L'ancien gouverneur du Massachusetts est pour l'instant le seul, avec Ron Paul, a être armé pour un long combat. Organisation, financement, soutiens : l'effort présidentiel de Romney coche toutes les cases.

 

Ainsi, si l'on imagine que Romney ne remportait qu'un seul scrutin en janvier, le New Hampshire, en laissant filer la victoire à Gingrich dans l'Iowa, la Caroline du Sud et la Floride, il pourrait immédiatement se rabattre sur les scrutins de février pour espérer marquer des points avant le Super Mardi du 6 mars, le jour où le maximum de délégués sera en jeu à la fois. En février, se trouvent justement des scrutins qui lui sont a priori très favorables, puisque ce sont des caucus qu'il a remporté en 2008 (Maine, Minnesota, Colorado) et qu'il pourra compter sur l'importante communauté mormone dans le Nevada et l'Arizona pour rattraper d'éventuels résultats médiocres en janvier.

 

A la lumière de ce constat, toute la stratégie de Romney, qui fait actuellement une poussée importante en Iowa, fait sens : si, comme Kerry en 2004, Romney parvenait à sauter Gingrich sur la ligne d'arrivée dans le "Hawkeye State", le 3 janvier prochain, alors il serait difficile à ses adversaires de se remettre du KO qu'ils subiraient à coup sûr une semaine plus tard dans le New Hampshire. L'effet d'entraînement des médias pourrait faire le reste en Caroline du Sud et en Floride et donner à Romney la chance de se tourner très tôt vers l'élection de novembre.

 

A l'heure qu'il est, deux scénarios sont donc envisageables. Dans celui qui semble pour le moment le plus probable, Gingrich remporte l'Iowa, met Romney en difficulté dans le New Hampshire, puis le bat en Caroline du Sud et en Floride. Mais il faudrait, en moins de trente jours, que Gingrich bâtisse une organisation présente dans les cinquante Etats pour empêcher Romney de revenir sur ses talons lors des 46 manches restantes. Dans le deuxième scénario, Romney remporte l'Iowa et est de facto inarrêtable : le seul moyen que ses adversaires conservateurs ont de l'arrêter est donc de prendre un très bon départ.

 

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