Romney aux côtés de George W. Bush dans le Massachusetts, en 2002 (Photo AP)
Comment imaginer que Barack Obama, président d’un pays dont la dette atteint 16.000 milliards de dollars et qui n’arrive à se sortir de la crise qu’à un rythme très lent, soit toujours en tête dans les sondages à cinquante jours du vote qui décidera de son sort à la tête du pays ? Réponse : les Américains ne le considèrent pas responsable de la situation actuelle.
Une large majorité d’Américains jugent en effet que le prédécesseur de Barack Obama à la Maison-Blanche, George W. Bush, est plus responsable que le président actuel du marasme économique dans lequel le pays est plongé. Selon un récent sondage conduit par Gallup en juin dernier, 68% des Américains jugent que Bush est à blâmer pour l’économie actuelle du pays, quand seulement 51% blâment Obama.
Si le président se trouve toujours en tête de la course à la présidence aujourd’hui, c’est qu’il a réussi – pour le moment – à convaincre les électeurs qu’élire Mitt Romney reviendrait à accorder un troisième mandat à Bush.
Et pour cause, Romney n’a jusqu’à présent nullement tenté de se distancer du 43e président des Etats-Unis aux yeux des électeurs. Depuis vingt ans aux Etats-Unis, tous les candidats devenus présidents sont parvenus à incarner une rupture avec les représentants précédents de leur parti au niveau national : Clinton fut le « New Democrat », Bush fut le « compassionate conservative », et Obama le jeune sénateur métis de l’Amérique post-raciale.
Au lieu de changer de disque par rapport au bilan catastrophique des années Bush, Romney se propose d’être « sévèrement conservateur », de réduire les impôts pour équilibrer le budget fédéral, et de montrer les crocs à l’international quoi qu’il en coûte, soit la continuation parfaite du prédécesseur d’Obama aux yeux des Américains.
Et pour cause, malgré sa campagne relativement modérée en 2000, Bush a dû se droitiser au cours de son mandat sous la pression des représentants et sénateurs républicains ultraconservateurs du Congrès, dont l’influence est de plus en plus grande ces quarante dernières années.
L’équation idéologique semble insoluble pour Romney, qui s’est largement plié à la dérive droitière du Parti républicain pour remporter les primaires. A moins de deux mois de l’élection, l’ancien gouverneur du Massachusetts se voit obliger de proposer aux Américains un programme plus à droite que celui de Bush, déjà considéré par les électeurs comme responsable du mauvais bilan du président actuel. Comment l’emporter ?
Il semble, plus que jamais, que seule une dégradation sensible de l’économie américaine dans les cinquante prochains jours puisse sauver la candidature de Romney. Son opération séduction à la convention a tourné court après le « show Clinton », qui a clairement mis en évidence les errements idéologiques du parti de l’éléphant ces dernières années. Sa critique du président dans la gestion de l’affaire de l’ambassadeur américain en Libye est un signe de désespoir criant.
Romney pourra certes compter sur trois débats présidentiels et un avantage de 80 millions de dollars sur le président pour faire entendre son message sur les ondes. Mais les Américains ne se contenteront pas d’une dénonciation du bilan d’Obama, qui sonne dans leurs oreilles comme le résultat de l’action de Bush. Il faudra bel et bien à Romney proposer un message positif qui lui permettra de démontrer qu’il sera meilleur qu’Obama pour relancer l’économie du pays.
Mais pour cela, il lui faudra se couper de Bush, ainsi que des idées de son parti. Mission impossible ?
Paru dans le Huffington Post le 12 septembre 2012.
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